vendredi 26 avril 2013

Les excuses de Mas, l’angoisse des victimes

6.012 femmes sont constituées parties civiles au procès de Marseille pour demander réparation de la tromperie.

27 avril 2013. Jean-Claude Mas n’est pas compatissant mais au fil du procès, il doit penser que ses excuses non homologuées pourraient comme son gel à l’huile industrielle, être homologuables. « Je demande pardon aux patientes pour la tromperie faite par PIP. J’espère que la nature des débats sera de nature à les réconforter, cela devrait bien les soulager », a poussé le septuagénaire qui encourt 5 ans d’emprisonnement et 375.000 euros d’amende. Il nie l’escroquerie, reconnaît la tromperie sans la circonstance aggravante de l’exposition au danger.
Après huit journées complètes d’instruction du dossier, les positions des autres prévenus n’ont pas changé. Hannelore Font, directrice qualité, reconnaît avoir su l’existence du gel frauduleux mais pas son caractère dangereux. Pareil pour Loïc Gossart, directeur de la production, qui se dit responsable moralement mais pas pénalement. Claude Couty, le DG, « assume » mais qu’à compter de 2009 quand il s’est « posé des questions sur la dangerosité ». Thierry Brinon, son directeur R&D, se couvre, nie tout même la dangerosité qu’il pointait pourtant jadis. Hier, il a ironisé dans un long couplet sur les absents : « Les bâtisseurs de la fraude en 2001 sont absents de ce procès. Je n’accepte pas le concept de « démission blanchissante » surtout quand cela se termine par une transaction. J’ai essayé d’utiliser tous les moyens dont je disposais. Mon prédécesseur vertueux qui passe pour un héros n’a rien fait et a laissé perdurer. Ceux qui sont partis, ils n’ont rien fait après alors qu’ils n’avaient plus de lien contractuel. »
Sur la question de la dangerosité des implants PIP, un rapport officiel anglais de juin 2012 rejoint les conclusions de l’ANSM en France : « Les implants PIP sont clairement de qualité inférieure bien qu’il n’existe aucune preuve d’augmentation significative du risque de problèmes cliniques en l’absence de rupture », résume le National Health Service et ils ne « sont pas associés à un risque accru de cancer du sein ou d’autres formes de cancer par rapport aux autres implants mammaires ».

« La confiance dans le corps médical, pour moi c’est terminé »
C’est bien l’angoisse majeure exprimée à Marseille par nombre de victimes, outre les souffrances physiques et morales endurées par les opérations d’explantation recommandées par les autorités de santé de nombreux pays. Elles sont précisément 6012 à s’être constituées parties pour demander réparation de cette tromperie à grande échelle.
« Ils m’ont fait vivre un enfer. On m’a pris mon entreprise. Ils ont ruiné ma vie. S’ils mangent leur pain noir aujourd’hui, moi c’est de la vache enragée que je mange chaque jour », a lancé hier Christine aux prévenus. Sandrine « Vous dites qu’on se plaignait pour du fric mais ce sont vous M. Mas et vos acolytes qui ont agi pour le fric, pour vos salaires confortables ! », a crié Sandrine.
« J’attends justice. C’est la seule chose qui nous reste. Que ce procès serve d’exemple dans ce pays où l’on fait du profit sur la santé », s’est indignée Julia pour qui « la confiance dans le corps médical, pour moi c’est terminé. » Après une reconstruction difficile suite à un cancer du sein mal diagnostiqué au départ, elle reçoit une lettre de l’Institut Curie la prévenant qu’elle porte un implant PIP. « La terre s’est mise à trembler. Cette lettre, c’était une agression. J’ai eu une colère à avoir envie d’ouvrir les fenêtres et de crier. Mais vers qui je me retourne ?! Où est le corps médical ?! » L’avocate de l’Institut Curie constitué partie civile a alors pris la parole : « L’Institut Curie a placé 573 prothèses PIP. Nous avons envoyé cette lettre préventivement à nos patientes avant la médiatisation. Nous sommes votre agresseur et nous en sommes désolés. » Le procès reprend lundi avec les plaidoiries des parties civiles.
David COQUILLE

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